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Journaliste depuis 30 ans, à la fois spécialiste des pays en proie à des conflits et des questions d'écologie,de protection de la nature et de société; derniers livres publiés: Guerres et environnement (Delachaux et Niestlé), L'horreur écologique (Delachaux et Niestlé), "La Grande Surveillance" (Le Seuil),une enquête sur tous les fichages (vidéo, internet, cartes bancaires,cartes médicales, telephone, etc). Et enfin "Enquête sur la biodiversité" (ed Scrinéo, coll Carnets de l'info). Aprés 20 ans au Journal du Dimanche, collabore désormais à l'hebdomadaire Politis et à Médiapart.

mercredi 14 mai 2008

OGM: aprés la rigolade, les choses sérieuses

14 Mai

Bon, avec le coup des OGM envoyé au tapis, on a bien rigolé, ce qui, par ces temps difficiles, fait toujours plaisir, mais...
Dans les députés de la majorité qui ont joué les absents à l'assemblée nationale, il y avait...
- ceux qui, travaillés au corps par le groupe de pression du GNIS, de Monsanto et autres Lamagrain sous la direction du sénateur Bizet, trouvent que la loi proposée n'est pas assez favorable aux OGM.
- ceux qui, à l'écoute de leurs électeurs et des associations locales et régionales, sentent bien qu'il y a en France, 80 % de la population qui, pour de bonnes et de mauvaises raisons, refusent de consommer des produits contenant des végétaux génétiquement modifiés.
Ce qui ne fait en aucun cas une majorité pour nous éviter ce type de culture. D'autant plus que derrière le maïs et le soja, attendent les tomates, les fraises et les pommes de terre génétiquement modifiées déjà "à l'essai" aux Etats Unis.

A titre d'illustration, voici ce que me disait en interview, la sénatrice Marie-Christine Blandin il y a quelques quelques jours:

Marie-Christine Blandin, sénatrice des Verts, a bataillé ferme au long des deux passages de la loi sur les OGM. Avec un succès pour les groupes de pression qui se sont succédés depuis des mois auprès des parlementaires. Marie-Christine Blandin nous explique comment les groupes industriels ont exercé leurs pressions et comment ils continuent en leurs expliquant que seuls les OGM pourront résoudre la crise alimentaire mondiale.

Comment qualifiez ces pressions ?

Elles ont été à la fois amicales, diffuses, conviviales et complexes ; donc d’une efficacité redoutable, implacable.

Quelles formes prennent-elles ?

D’abord, depuis longtemps, car l’offensive a été préparée de longue date, par de luxueuses brochures éditées par les semenciers, brochures sur papier glacé, très pédagogiques, avec de belles illustrations où ils vantent leurs actions et leurs produits. Et surtout dans lesquelles ils flattent le rôle des parlementaires et leurs fonctions. Et dans certaines de ces brochures, les amendements sont tout prêts.

La littérature habituelle...

Non, pas du tout, il s’agit de publications éditées spécialement pour les parlementaires, donc à faibles tirages. Le plus surprenant est que ces brochures sont signées à la fois par le GNIS, le Groupement National Interprofessionnel des semences et par l’UIPP qui regroupe les fabricants de produits phytosanitaires. Démarche paradoxale puisque les modifications génétiques sont censées éradiquer l’utilisation de ces produits. Ces gens sont tellement sur d’eux qu’ils ne craignent pas la contradiction, persuadés qu’ils sont qu’elle passera inaperçue.

Ils sont si naïfs ?

Il n’y a pas que cela, bien sur. Régulièrement nous recevons de modestes informations de quatre pages, mal présentées, d’origine mal définie, sous le couvert d’une étrange association, qui publie « agriculture et environnement » (1). Sur tous les thèmes, cette feuille, un véritable libelle, attaque violemment ceux qui mettent en doute l’agriculture intensive et évoquent le réchauffement climatique. On y trouve des calomnies, des diffamations sur le professeur Belpomme, Greenpeace, Nicolas Hulot, le WWF ou l’association Kokopelli. Souvent des attaques sordides. Avec un ton presque militant. Comme ce n’est pas sur papier glacé, c’est presque plus efficace.

Les parlementaires y croient ?

En général ils reprennent sans aucun esprit critique le contenu de ces feuilles. Ils sont très efficaces. Comme les gens de l’AFIS, l’association française pour l’information scientifique qui se donne, je cite, comme but de promouvoir la science contre ceux qui nient ses valeurs culturelles, la détournent vers des oeuvres malfaisantes ou encore usent de son nom pour couvrir des opérations charlatanesques. Ils sont présents dans tous les colloques, dans toutes les réunions, ils ont des moyens. Il ont regretté publiquement qu’une « chaîne publique ai diffusé le film sur Monsanto de Marie-Dominique Robin » ; ils l’attaquent de toute part.

Et la corruption ?

C’est beaucoup plus subtil que cela. Il y a notamment un cabinet de lobbying, Boury et associés, qui travaille pour les grandes sociétés. Ils repèrent ceux qui ont du poids, de l’influence et ils les invitent au restaurant Ledoyen, un restaurant de luxe des Champs-Élysées. Le Gnis y reçoit régulièrement des parlementaires, ils y sont entre eux, entre happy few. Une fois, je me suis fait avoir. J’y suis allée, j’ai discuté mon point de vue avec un autre parlementaire. Ensuite, ils ont publié un compte rendu de ce déjeuner en ne reprenant que leurs arguments. Avec comme mention que j’étais « à leurs côtés », comme si j’étais d’accord avec eux.

Les voyages ?

Bien sur cela fait partie de la panoplie, c’est l’artillerie lourde, ils emmènent des parlementaires en voyage lointain, un ou deux à la fois, un de la majorité, un de l’opposition et de la majorité. Là, évidemment, on ne m’invite pas. Et puis, pour les pressions sur les autres parlementaires, il y a l’incontournable Jean Bizet (2), le représentant quasi-officiel de l’agriculture productiviste et des industriels des OGM. Rien ne se passe au Sénat sans qu’il prenne les choses en main. Il a littéralement « cassé » son collègue de la Manche, Jean-François Legrand.

(1) Renseignements pris certaines des informations sont envoyées par une lettre confidentielle publiée par une officine de conseils en économie et en environnement, Amos Prospective, soutenue par les sociétés agroalimentaires et dirigée par un franco-danois, Gil Rivière-Wekstein. La plupart des textes de cette lettre sont ouvertement pro-nucléaires et soutiennent les positions les plus ultras de l’agriculture intensive et des multinationales des semences et des produits phytosanitaires.

(2) Jean Bizet, sénateur UMP de la Manche, vétérinaire, est comme le fut son père pour défendre le veau aux hormones, le député Emile Bizet, également vétérinaire, le porte-parole tout à fait officiel et reconnu du lobby agricole depuis des années et organise tous les colloques

6 commentaires:

Anonyme a dit…

J'en ai les larmes aux yeux tellement le projet OGM porté par ces lobbies est odieux. Vraiment les larmes aux yeux. De grace, diffusez cet article partout ou vous pouvez. Du monde en passant par Marianne ou même VSD, Closer, Voici, etc... Les Français, le monde, doivent savoir.

Anonyme a dit…

Merci de nous tenir informé Claude-Marie ! C'est essentiel... Je diffuse à max cette information !!!

Anonyme a dit…

À part ça, le peuple est souverain et la France est une belle démocratie.

Anonyme a dit…

Ce qui serait vraiment tres tres bien serait de scanner ces brochures sur papier glace et de les mettre sur le web...

Blog de Claude-Marie Vadrot a dit…

Bonne idée, je vais les demander à Marie-Christine Blandin

cmv

Anonyme a dit…

Merci Claude-Marie pour le dernier bouquin (l'horreur écologique). Cette gifle fait du bien.
Si non ne veut pas sombrer dans l'horreur, le moindre mal :

Voter Vert

Il n'y a pas assez de contre pouvoir dans le domaine de l'Environnement en France.
Les citoyens sont contre les OGM's, certes. Ils n'ont qu'à le dire autrement que "statistiquement". IL FAUT SE BOUGER. Par les urnes, ou en créant des assocs locales pour informer, diffuser les infos et autres bouquins de journalistes qui s'occupent d'informer autrement...

Bonne continuation. Et un grand merci.

Pierre.