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Journaliste depuis 30 ans, à la fois spécialiste des pays en proie à des conflits et des questions d'écologie,de protection de la nature et de société; derniers livres publiés: Guerres et environnement (Delachaux et Niestlé), L'horreur écologique (Delachaux et Niestlé), "La Grande Surveillance" (Le Seuil),une enquête sur tous les fichages (vidéo, internet, cartes bancaires,cartes médicales, telephone, etc). Et enfin "Enquête sur la biodiversité" (ed Scrinéo, coll Carnets de l'info). Aprés 20 ans au Journal du Dimanche, collabore désormais à l'hebdomadaire Politis et à Médiapart.

vendredi 7 septembre 2007

Moscou, l'environnement, la mal bouffe et Poutine

Moscou, 8 septembre (suite)

Moscou, que je connais depuis les années 70, notamment pour y avoir été envoyé spécial permanent pour le Matin de Paris puis pour le Journal du Dimanche est devenue l'une des capitales (12 millions d'habitants officiellement...) les plus embouteillées du monde. En voiture, du sud de la ville il faut, le matin, entre deux heures et deux heures et demie pour arriver dans la centre. Saisissant! Et, je l’ai constaté en revenant de province par le nord, la queue est à peu prés aussi longue le soir vers les banlieues et les villes satellites qui, en plus sont en train de bouffer toutes les zones forestières qui avaient été préservées par le régime communiste, y compris sous Gorbatchev et dans les débuts de Eltsine. Dans ces conditions, la pollution de l'air est évidemment extraordinaire dans la capitale et les fous qui prennent s’obstinent à prendre leurs voitures (ce que je ne parviens pas à me faire expliquer) passent entre trois et quatre heures par jour dans leurs caisses ; plus encore, le vendredi ! Cette situation ne contribue évidemment pas à prolonger l'espérance de vie de ses habitants déjà minés (pour certains) par la pauvreté, par l'alcoolisme (pour beaucoup) et, pour tous, par les pires des nourritures fourguées par les multinationales (Danone et bien d'autres) qui ne parviennent plus à les caser en Europe. La plupart des additifs, des produits interdits en Europe, sont sur le marché moscovite et les pires sont presque exclusivement vendus en province : aujourd’hui, à Alexandrov, 150 kilomètres de Moscou, j’ai remarqué et goûté (du bout des lèvres, juste pour voir) des choses incroyables). De toute façon, depuis l’arrivée de Poutine au pouvoir, le ministère de l’environnement a été supprimé et il n'y a aucune organisme sur la consommation.

La Russie a ceci en commun avec les pays du sud, qu’elle est devenue la poubelle alimentaire (et autre...) de l’Occident. Résultat : l'année dernière, comme la province n'est pas mieux dotée, encore plus pauvre et mal nourrie, la population a encore diminué malgré l'arrivée des Russes qui vivaient encore dans les anciennes républiques aujourd'hui indépendantes. Mais que l’on se rassure : toutes les boutiques et marques de luxes que nous connaissons sont omniprésentes à Moscou (et à Saint-Pétersbourg et à Ekaterinbourg).

Et la mondialisation se lit dans "l'urbanisme commercial" installé dans les grandes avenues: de Auchan à Continent en passant par Ikea, Atac et autres bienfaiteurs de l'humanité. Comme quoi le passage à la démocratie (que j'ai vécue avec enthousiasme) peut aussi mener à la faillite. J'ai connu une Russie qui écrasait les libertés au nom du parti communiste, je connais désormais une Russie qui écrase les libertés au nom du libéralisme. Comme le dit la vieille chanson: " c'était pas la peine, c'était pas la peine, assurément, de changer de gouvernement..." Ce pays devient fou. Et ses habitants ne croient plus à la démocratie...

Dernier combat des "jeunes pour Poutine" dont l'organisation fait irrésistiblement penser aux "Jeunes communistes": une campagne contre le port du string, accusé de mener à la pornographie et à limiter les naissances (Ce qui me parait contradictoire...). Et le 12 septembre, pour faire plaisir aux « jeunes pour Poutine » et au président, le gouverneur d'Oulianovsk, ville natale de Lénine sur la Volga, organise une "journée de la procréation" et donne une jour de congé à ses citoyens pour qu'ils la consacrent à se reproduire...

A part cela, les campagnes sont dans un état épouvantable et croulent sous tous les déchets et toutes les pollutions. Prés de Pereslav, au nord de Moscou, j’ai fait un tour dans un petite village qui me sert de test depuis 1991 : ils n’ont toujours pas l’eau courante dans les maisons. Mais ils ont les télés de Poutine puisqu’il n’y a plus qu’elles...

A suivre...

PS A part cela, le 7 octobre quelques centaines de personnes commémoreront le souvenir de mon amie Anna Politovskaïa, la journaliste assassinée l’année dernière....L’année dernière, deux mois après le meurtre, ils étaient 500...

PPS Preuve qu’il y a bien de la misère chez les riches, quelques milliardaires moscovites se plaignent : certaines des machines à faire de la neige pour qu’ils puissent se rouler dedans en sortant du sauna (ici, le bania) sont tombées en panne cet été.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

En fait tout celà est très intéressant (selon l'expression consacrée) mais je fatigue soudain (et souvent). Je me demande à quoi sert d'essayer de faire quelque chose pour quelques-uns qui s'en foutent complètement (à priorià , à quoi sert de combattre les colorants, additifs, etc...la vie est courte et je me ds que pendant ce temps, mes enfants poussent tandis que je suis derrière mon ordinateur à m'informer des embouteillages à Moscou et de leur aliénation aux produits pourris que DAnone n'arrive plus à nous refiler. La cause m'est acquise mais je fatigue (c'est peut-être la rentrée). que faire ?

Blog de Claude-Marie Vadrot a dit…

Continuer. Nous ne vivons pas (de mon point de vue) que pour nous et nos proches. Il existe une sorte de devoir collectif, un devoir du collectif qui pousse à se dire que si on peut aider une seule personne, on a gagné. Si, chaque jour, au cours de ma vie de journalistes, j'ai convaincu, fait changer d'avis, une dizaine de personnes, même une seule, j'ai gagné, je n'ai pas perdu mon temps, j'ai partagé. C'est ce qui m'incite à continuer aprés 40 ans de journalisme.

cmv

Alexis K.V. a dit…

La "journée de la procréation"... sidérant. Sidérant de voir que des gens peuvent être convaincus qu'ils inciteront la population à procréer et à enfanter via une telle propagande de bas étage.

Ça me rappelle les Poyuschie Vmestme, avatar musical des précédentes jeunesses poutiniennes, les Iduschie Vmeste ("Ceux qui marchent ensemble"), et leur album Takogo, kak Putin , You Must Be Like Putin dans sa version "export". Sur ledit opus, on trouvait, entre un titre vantant les mérites de l'industrie nationale ("Vkladyvay zdes'" - "Investis chez nous") et la chanson éponyme glorifiant la perfection (ahem) qu'incarne Poutine, une morceau nommé "Malen'koye Tchudo" ("Petit Miracle"). Une ballade sirupeuse anti-avortement que les "pro-life" les plus réacs d'outre-atlantique auraient pu adopter en guise d'hymne, s'ils connaissaient le russe.

Le truc à la fois triste et drôle, c'est que la musique était composée par un dénommé Kirill Kalachnikov. Cherchez l'erreur...

AKV

Blog de Claude-Marie Vadrot a dit…

Donc, ça rappelle le temps de Brejnev...

CMV