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Journaliste depuis 30 ans, à la fois spécialiste des pays en proie à des conflits et des questions d'écologie,de protection de la nature et de société; derniers livres publiés: Guerres et environnement (Delachaux et Niestlé), L'horreur écologique (Delachaux et Niestlé), "La Grande Surveillance" (Le Seuil),une enquête sur tous les fichages (vidéo, internet, cartes bancaires,cartes médicales, telephone, etc). Et enfin "Enquête sur la biodiversité" (ed Scrinéo, coll Carnets de l'info). Aprés 20 ans au Journal du Dimanche, collabore désormais à l'hebdomadaire Politis et à Médiapart.

samedi 23 octobre 2010

Un débat sur les éoliennes pris en otage par les pleureuses du paysage

Samedi 23 octobre

Il y a quelques jours, à la mairie du Tréport, la Commission particulière du débat public chargée d’organiser la discussion sur le projet de champs d’éoliennes off-shore proposé par la Compagnie du Vent, a rendu publiquement compte des réunions organisées depuis le mois d’avril dans la Somme et la Seine maritime pour que tous les citoyens, les municipalités et le associations concernées d’expriment. Les groupes minoritaires opposés à la mise en place de 140 éoliennes de 5 Mw à 18 kilomètres du littoral auront ne se tiennent pas pour battus alors que tous les sondages et les enquêtes indiquent qu’environ 80% des habitants de la région sont favorables à un projet, qui d’après ses promoteurs, devraient créer à terme 2000 emplois qualifiés pour la maintenance et l’entretien.
Placée sous la direction de Philippe Marzolf, la Commission a déployé des trésors d’imagination pour d’organiser une débat exemplaire en innovant. Car outre les douze réunions mettant en présence les différents protagonistes, un site (1) a été ouvert, site sur lequel il était et est encore possible aujourd’hui, de prendre connaissance du contenu des réunions et de consulter les dossiers des différents acteurs, à commencer par celui du maître d’ouvrage. Sans oublier les questions et les opinions des citoyens qui cherchent simplement à comprendre, à peser le pour et le contre et non pas à s’opposer systématiquement. Ce site a également permis, pour ceux qui ne pouvaient y assister, de suivre en direct la plupart des réunions. De quoi permettre aux habitants de la région de se faire une opinion en dehors des pressions exercées par la Fédération Environnement Durable et l’association locale « SOS à l’horizon » : leur objectif, casser une discussion sereine sur les avantages et les inconvénients d’un projet qui pourrait être le premier champ d’éoliennes en mer sur les côtes françaises et l’un des plus importants d’Europe, même s’il resterait plus modeste que ceux réalisés, par exemple, en Grande Bretagne et au Danemark.
La Commission particulière, comme toutes ses semblables, n’a pas pour fonction ni pour objectif de rendre un avis, mais plus simplement de fournir un compte rendu le plus exhaustif possible des opinions et des demandes exprimées, notamment par les pêcheurs qui craignaient que leurs activités soient perturbées et, pour reprendre un argument des adversaires de l’éolien, que les poisson soient chassés des eaux par les grands moulins à vent. Alors que les exemples étrangers ont montré que la faune aquatique n’était pas le moins du monde perturbée par ce type d’équipement. Au contraire, les enrochements mis en place au pied de chaque éolienne, devraient faciliter la fixation de la reproduction de la faune marine. La tache de la Commission, confrontée à un harcèlement constant, n’a pas été facile même si elle a sans cesse rappelé comme l’explique son président qu’elle est « indépendante du maître d’ouvrage, de tous les acteurs. Nous n’avons pas d’avis à donner. Nous sommes là pour organiser un débat de plus équitable possible, même si ce n’est pas facile parce que les débats sont passionnés ».
Cette procédure de débat public précède l’enquête publique qui interviendra plus tard si la Compagnie du Vent, récemment devenue filiale du groupe GDF-Suez, décide de proposer la mise en oeuvre du projet. Cette procédure de débat public, qui est terminée depuis le 10 septembre, a été créée par la loi Barnier du 2 février 1995 inventant une autorité administrative indépendante, la Commission Nationale du Débat Public. Laquelle, pour chaque projet d’envergure, crée une instance particulière qui prépare, organise les débats et suit l’aménagement s’il la décision est un jour prise de le mener à bien. La loi de 1995, correspond à l’esprit et à la lettre de la Convention d’Aarahus de 1998 sur « la participation du public aux processus de décision » actuellement signée par une quarantaine de pays et l’Union européenne.
Les adversaires des éoliennes, qui recrutent leurs appuis dans des réseaux giscardiens particulièrement actifs, ont mené une campagne souvent mensongère contre le projet, appuyée sur leur volonté de rejeter partout en France le recours à l’énergie éolienne pour produire un peu d’électricité renouvelable n’entraînant ni pollution si effet de serre. Un peu, car il n’est pas plus question de passer au « tout éolien » comme on est passé au tout nucléaire. Il s’agit d’une diversification, comme le solaire ou la biomasse, dans la production énergétique. D’ordinaire, les campagnes virulentes de ces associations qui ne regroupent que quelques centaines de membres, s’appuient sur la préservation du paysage et sur la supposée dépréciation des résidences, secondaires ou autres manoirs se retrouvant au voisinage des fermes éoliennes terrestres. Cette fois, ces groupes liés aux associations défendant un paysage idéal qui, hélas, est parsemé de lignes à haute tension, d’usines, de centrales nucléaires et d’entrées de ville gâchées par des urbanisations commerciales catastrophiques, ont du faire une effort d’imagination pour poursuivre leur croisade. Ils ont notamment les photos montages faisant apparaître les éoliennes comme des monstres cernant de prés le littoral alors qu’à la distance prévue, elles seront à peine visibles à l’oeil nu. A condition qu’il n’y ait pas du tout de brume. Des photos montages qui ressemblent furieusement à celui qui avait été fabriqué et diffusé pour protester contre des éoliennes prévues à 20 kilomètres du Mont Saint Michel : les éoliennes avaient carrément été hissés sur ce site classé.
Cet acharnement est évidemment plus que suspect, quoi que l’on puisse penser de l’offensive de grands groupes industriels à propos de l’éolien, loin du rêve de l’éolienne de jardin maîtrisable par une seule famille écolo. Mais, s’agissant de la Somme et de la Seine Maritime, on ne peut manquer de remarquer que les opposants, ne disent rien sur la centrale de Penly et ce n’est sans doute par un hasard malencontreux que le responsable de l’association locale est un ancien d’EDF. Un hasard qui rejoint l’organisation au sénat, il y a trois ans, d’un colloque « anti-éoliens » dans lequel trônaient quelques associations pro-nucléaires, notamment la Société française de l’énergie nucléaire, et animé par le journaliste Emmanuel Grenier, fanatique bien connu du nucléaire. On complétera, le pedigree du confrère, en précisant qu’il fut candidat à la dernière élection européenne sur la liste de Jacques Cheminade, pseudo gauchiste du Parti Ouvrier Européen représentant en France, de la secte politique de l’Américain Lyndon Larouche qui marie la religion, la science et l’anti-sémitisme..
Mais au delà de cette connivence avec les partisans des centrales nucléaires, c’est le principe du débat public qui est remis en cause quand il est pris en otage, qu’il s’agisse d’éolien ou d’autres équipements comme on l’a vu récemment pour les nanotechnologies, par un ou plusieurs groupes de pression minoritaires utilisant tous les moyens d’Internet et de la communication. Ce type de « terrorisme » verbal appuyé sur des contrevérités vide le Débat public, une belle idée, de sa substance et de sa fonction. Résultat : il d’empêche ou dissuade les citoyens de d’exprimer sereinement pour ou contre un projet, de reléguer leurs opinions derrière les outrances. A tel point que le 19 octobre, le président de la Commission a donné une large place à cette opposition farouche, au détriment des arguments raisonnables des partisans ou des sceptiques de l’énergie offerte par le vent.

(1) www.debatpublic-eolien-en-mer.org

dimanche 3 octobre 2010

Salon de l'auto: les constructeurs agitent la baguette magique de la fée électricité

Dimanche 3 octobre


Les rédacteurs automobiles, celui du Monde ou de France-Inter par exemple, qui veulent sauvegarder leur gagne-pain et beaucoup d’autres journalistes qui souhaitent sauver la civilisation automobile nous servent depuis quelques jours la recette que les volumineux dossiers de presse leur suggèrent depuis des semaines : la bagnole, dieu soit loué, sera sauvée par l’électricité. Déjà, ils oublient que ce numéro nous a été joué à plusieurs reprises. Pour la première fois en 1965 quand la Régie Renault a présenté au public une première voiture électrique dont elle affirmait alors que « dans quelques années » tout le monde roulerait en se branchant sur un réseau qui n’était pas encore nucléaire. Ce n’était pas une première puisque les premiers modèle « tout électrique » ont circulé au XIX éme siécle puis au XX ème siécle, ce qui ne plaisait évidemment pas aux marchands de pétrole. Donc, tous les projets, sérieux ou non, avortèrent rapidement. Electrique ou pas, une voiture reste une voiture. Si la voiture était une solution, les administrations publiques auraient fait ce choix depuis longtemps.
Depuis, à chaque fois que la conjoncture économique et sociale, ou la sagesse, incitent les acheteurs à prolonger la vie de leurs vieilles voiture (oui, je sais, il parait qu’elles polluent plus) les constructeurs nous font le coup de la bagnole électrique miracle. Cette fois, ils imaginent qu’ils sont portés par une (relative) prise de conscience d’une urgence écologique dont ils n’ont évidemment rien à faire. Et les voilà qui sanglotent sur l’épaule de Nicolas Sarkozy et sur celle de la ministre de l’écologie, Chantal Jouanno qui ne manquera pas de visiter le « Mondial de l’automobile », en expliquant que la prime à la casse leur avait permis de caser de nouveaux modèles et que c’est fini ! Initiative soi disant prise au nom de l’économie d’énergie, mais en oubliant, comme Jean-Louis Borloo qui invoque le Grenelle de l’environnement pour construire de nouvelles autoroutes, que la construction d’une nouvelle voiture (fut-elle recyclable à 80 %) entraîne une dépense d’énergie et des émissions de gaz à effet de serre bien plus importantes si l’on garde son vieux carrosse jusqu’à l’usure. Ce qui m’incite à conserver la mienne qui date de 1987 et qui me rend encore, même de plus en rarement, des services. Depuis longtemps, ces constructeurs sont pris en tenaille entre leurs prétentions à faire des modèles qui tombent moins en panne et la mode de la voiture jetable dont il faudrait changer au bout de deux ou trois ans. Ils auraient trouvé la solution miracle en nous vendant des voitures électriques bien plus chères que les autres...
Donc, le recours au scintillement présenté comme magique de la fée électricité n’a pour fonction que de nous faire croire que les constructeurs automobiles sont intelligents et veulent sauver la planète. Non, ils veulent simplement ravaler leur image de marque. En oubliant au passage que la fameuse électricité ne pousse pas par miracle au pied des immeubles ou dans les champs. Il faut la produire. Avec des centrales nucléaires, par exemple. De plus, il suffit de parcourir les allées du Salon de l’auto, que l’on me pardonne cette vieille appellation, pour voir qu’au delà de l’entreprise de communication, ce sont les bonnes grosses vieilles bagnoles qui colonisent les stands et les carnets de vente. : l’adoration du dieu voiture n’est pas derrière nous et on lui sacrifie encore de longs alignements d’arbres le long ses nationales et des départementales en leur reprochant, comme le Président du Conseil général du Loiret, de se précipiter au devant des automobilistes qui roulent trop vite ou sous imprégnations alcoolique.
Si je conteste la voiture, on m’objectera les emplois. Comme pour la production des armes multiples que nous vendons chaque année pour une somme qui avoisine les 10 milliards d’euros par an. Mais, comme il y a bien longtemps que le capitalisme français ne se préoccupe plus de ne pas « désespérer Billancourt », la question pourrait être bonne si la réponse n’était pas stupide. Comme je n’ignore pas que trop de zones rurales et trop de banlieues manquent de transports collectifs, je me dis qu’il suffirait de transférer progressivement les emplois (plus exactement les machines qui suppriment les emplois) vers une production massive de métro, de trams, de trains, de bus et d’équipements permettant d’offrir à chacun, quel que soit sa résidence, un moyen d’aller facilement au boulot et de fréquenter les espaces de loisirs sans attendre le bus ou le métro des heures et sans être transportés dans des conditions déplorables. Mais les Christian Gérondeau et tous les arnaqueurs de la « liberté offerte » par la voiture, ne veulent pas lâcher les rênes de leurs fantasmes. Au point de condamner tous ceux qui, désormais, sont présentés de façon subliminale comme de mauvais Français parce qu’ils font le choix du deux roues ; à pédales ou à moteur, engins dont le bilan énergétique et écologique est largement supérieur à celui de la voiture.
La fée électricité qui refait provisoirement son apparition fait l’impasse sur le pillage à venir des quelques pays qui possèdent les réserves de lithium pour les batteries. La fée électricité ne part à l’assaut médiatique des automobilistes que pour redorer le blason d’une fin de civilisation. Mais n’allez pas dire cela aux caciques de l’UMP qui se sont plaints vertement de la grève du 23 septembre qui a empêché certains de gagner Biarritz pour les journées parlementaires de la majorité en avion. En oubliant qu’ils pouvaient prendre le train...