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Journaliste depuis 30 ans, à la fois spécialiste des pays en proie à des conflits et des questions d'écologie,de protection de la nature et de société; derniers livres publiés: Guerres et environnement (Delachaux et Niestlé), L'horreur écologique (Delachaux et Niestlé), "La Grande Surveillance" (Le Seuil),une enquête sur tous les fichages (vidéo, internet, cartes bancaires,cartes médicales, telephone, etc). Et enfin "Enquête sur la biodiversité" (ed Scrinéo, coll Carnets de l'info). Aprés 20 ans au Journal du Dimanche, collabore désormais à l'hebdomadaire Politis et à Médiapart.

mercredi 14 décembre 2016

Retour d'activité de ce blog

Après une (trop) longue interruption de blog liée à une surcharge de travail, le voici de retour.

Une conférénce internationale inutile sur la biodiversité



Une bien trop discrète COP 13 vient de commencer ses travaux à Cancun, la ville balnéaire du Mexique aux 150 hôtels, d’où la plupart des espèces d’animaux et de plantes ont disparu depuis des années. Cette conférence intergouvernementale qui réunit 196 pays s’intéresse, comme les douze précédentes, à un sujet qui ne mobilise ni les foules ni les politiques : l’évolution de la biodiversité. Jusqu’au 17 décembre les participants devront étudier les raisons « justifiant » que depuis 2010 les objectifs  des gouvernements alors fixés, ne soient réalisés qu’à 5 %. Peu de chances pour que le plan adopté il y a six ans d’arrêter la perte de biodiversité en 2020 soit atteint à temps. D’autant plus que la Convention sur la Biodiversité Biologique de 30 pages adoptée dans l’enthousiasme à la Conférence de Rio…en 1992 n’a pas encore bénéficié du moindre début de mise en œuvre (https://www.cbd.int/doc/legal/cbd-fr.pdf).

Comme le rappelait il y a quelques semaines le rapport publié par le WWF (wwf.fr/vous_informer/rapport_planete_vivante_2016/), le temps presse puisque d’ici à 2020, les deux tiers de vertébrés pourraient, si  la destruction des écosystèmes n’est pas réduite, avoir disparu ou atteindre un niveau d’extinction irréversible. Il ne s’agit pas simplement de sauvegarder quelques espèces emblématiques comme l’éléphant, les baleines, le rhinocéros ou la panthère des neiges mais tous les animaux qui échappent à l’attention du public et qui constituent l’essentiel du fonctionnement et de la richesse des milieux naturels. Le même raisonnement s’appliquant aux plantes et aux insectes systématiquement éliminés  par les produits phytosanitaires et les cueillettes sauvages organisées par les grands laboratoires pharmaceutiques.
D’ailleurs la réunion de Cancun a mis, à la demande des naturalistes, dans son ordre du jour la préservation de tous les insectes pollinisateurs (notamment, mais pas seulement les abeilles) qui disparaissent aussi bien dans les pays industrialisés que dans les nations du Sud où les majors de l’agrochimie utilisent sans contrôle les insecticides. Lesquels y sont encore largement  épandus sur les cultures pour écouler les stocks des quelques substances peu à peu interdites dans les pays riches, sous l’action de la société civile.
Autre objet de la discussion entamée le 4 décembre : la disparition des forêts dont les surfaces sont reconverties, et donc rasées, pour laisser de la place aux productions d’huile de palme, de coton et de soja. La France, par ses importations grandissantes de ses produits, porte d’ailleurs une lourde responsabilité dans ce type de destructions. Elle n’est pas la seule mais les grandes sociétés de la chimie agricole sont présentes à Cancun pour tenter de mettre en échec les demandes des naturalistes et des paysans adeptes d’une agriculture traditionnelle et respectueuses des équilibres naturels.

Les représentants des associations françaises de protection de la nature insisteront aussi sur le peu d’intérêt des autorités politiques de la France envers la préservation de la biodiversité. En rappelant le peu de cas qu’elles en font en refusant de renforcer la population des ours pyrénéens, en autorisant les tirs contre les loups et en participant à l’artificialisation des terres agricoles :par exemple  et en maintenant  des projets comme la construction d’un nouvel aéroport à Notre-Dame-des-Landes.
Les quatre années de laborieuses discussions de la loi sur la biodiversité adoptée il y a quelques mois par les parlementaires avant tout soucieux de préserver leur clientèle d’agriculteurs intensif et de fabricants de pesticides est une illustration de l’indifférence des politiques et du ministère de l’Ecologie, pour la préservation d’une biodiversité indispensable.

Trump et l'écologie: les révélations effarentes d'une association américaine



D’après le document que s’est procuré le Centre pour les Médias et la Démocratie, organisme associatif américain qui s’est donnée pour tâche depuis une vingtaine d’années d’enquêter sur la corruption et sur le rôle des groupes de pression privées , la ligne de conduite de Donald Trump sur les questions environnementales est aussi  catastrophique que le craignaient les scientifiques et les écologistes.

La note révélée qui fixe la politique de Trump, a été remise au président élu quelques jours après son élection et avant ses premières nominations. Elle a été préparée par Thomas Pyle, son éminence grise et responsable de l’équipe présidentielle chargée de la transition énergétique dans la nouvelle administration. Ce Thomas Pyles, a été le conseiller (énergie et environnement) de plusieurs entreprises pétrolières ou chimiques, et également celui de la majorité conservatrice de la Chambre des Représentants. Le  document établi par  cet adversaire de toute réglementation environnementale, comporte une liste de 14 sujets que le nouveau président devra mettre en œuvre « pour que son administration adopte des mesures favorables à la production énergétique basée sur les lois du marché (…) nous pensons qu’il faudra nommer des personnalités soucieuses de respecter les principes de la liberté de la concurrence et de mettre fin les dangereuses politiques de l’administration Obama».

Ces conseils, déjà en partie suivis d’effets, ne surprennent pas d’un homme  à la fois président de l’Institut pour la Recherche Energétique et président de l’Alliance Américaine pour l’Energie. Deux organismes financés par les entreprises du secteur du pétrole et du gaz dont les contributeurs les plus importants sont Exxon Mobil et les sociétés des frères Koch. Ces derniers  financent largement le lobby climato-sceptique depuis des années. Thomas Pyle écrit dans sa note « qu’il faut retirer son pouvoir à Washington et le rendre aux Etats et au peuple, ce qui permettra aux industries des énergies fossiles de reprendre le contrôle ». Ce qui implique, explique l’auteur, de remettre en cause l’Accord de Paris et le « soi-disant » Clean Air Act, la loi sur la diminution de la pollution de l’air et des émissions de gaz à effet de serre promulguée par Obama .Texte actuellement bloqué par la Cour d’appel de Washington par un procès intenté par de nombreuses entreprises et  27 Etats. Ces deux points figurent en tête de la liste des quatorze points abordés dans la note. Viennent ensuite…

+ L’annulation du moratoire limitant le recours au charbon et son exploitation.
+ Autorisation de tous les projets d’oléoduc  actuellement suspendus, qu’il s’agisse du projet Keystone ou du Projet Dakota ; et intensification de la mise en place de ce type de transport du pétrole à travers le pays.
+ Reconsidérer tous les résultats des recherches attribuant à l’Homme le réchauffement climatique tels qu’ils ont été mis en avant par l’administration Obama.
+ Réexaminer les conséquences environnementales des éoliennes, car elles qui affectent la vie sauvage, entrainant notamment  la mort des oiseaux et des chauves-souris.
+ Réduire les subventions qui sont attribués aux énergies renouvelables.
+ Revoir les décisions inconstitutionnelles de la réglementation de l’administration Obama sur la préservation des eaux telle qu’elle a été définie par la loi sur le « Clean Water act »
+ Assouplir la réglementation sur les caractéristiques des carburants automobiles. Soit pour la supprimer, soit pour la revoir de façon à ce qu’elle soit conforme au fonctionnement de l’économie.
+ Mettre fin aux références à un  « coût social » de l’émission du carbone pour la règlementation fédérale car elles ne sont pas conformes aux dernières recherches scientifiques.
+ Réduire les pouvoirs de l’Agence Fédérale pour la protection de l’environnement (EPA).

Cette dernière prescription, pour ne prendre que cet exemple, a été suivie par Donald Trump qui a été nommé Scott Pruitt comme président de l’EPA. Pruitt s’est fait connaitre, en tant que ministre de la justice de l’Etat de l’Oklahoma, comme le chef de file de la bataille juridique, avec de le concours de 27 Etats et des industries de l’énergie fossile, par le procès en cours pour faire annuler une loi de l’administration Obama. Une loi nécessaire  pour que les USA puisent se conformer à l’Accord de Paris. En fait, tout le mémorandum  de Thomas Pyle est une longue recommandation argumentée pour  supprimer tous les textes liés à l’énergie, à l’environnement et à la nature.

Pollution et égoïsme: "mais je vais devoir prendre le métro ! "



Cette phrase horrifiée entendue dans une radio laisse rêveur et atterré. Elle a été proférée par un jeune automobiliste prié par la police d’abandonner sa voiture à une porte sud de Paris parce que son véhicule n’arborait pas une plaque d’immatriculation lui permettant de circuler malgré la pollution aux particules et aux oxydes d’azote régnant dans la capitale et dans les 22 communes qui l’entourent. Un autre conducteur en infraction grommelait dans le micro : « ils ne savent plus quoi faire pour nous emmerder »…
Surpris et pensant que ma consœur avait choisi les remarques les plus stupides ou les plus mensongères, je suis allé me poster une trentaine de minutes du côté de la Porte de Bagnolet, dans l’Est parisien. Pour prêter l’oreille aux commentaires des automobilistes interpelés par les policiers parce que leur véhicule portait un numéro impair. Cela n’a pas valeur ni de sondage ni de statistique incontestable. Juste quelques minutes dans la vie d’un écologiste atterré par la mauvaise foi des conducteurs.

Au volant d’une Twingo une femme d’une quarantaine d’années explique sans rire qu’elle a un gros  déménagement urgent « et que les alertes à la pollution ne sont qu’un moyen de plus d’emmerder  les conducteurs » et en profite pour évoquer le « scandale » de la fermeture des voies sur berges « qui provoque bien plus de pollution dans un quartier plutôt épargné par les gaz d’échappement ».
Un homme d’une cinquantaine d’années, au volant d’une Mercedes immatriculée dans le 95, assure qu’il n’était pas au courant, qu’il ne lit jamais les journaux. Affirmation la plus courante.
Un homme d’une soixantaine d’années explique être plombier et se rendre dans le 10° arrondissement pour une intervention urgente. Il parait si peu convainquant, qu’il est prié d’ouvrir son coffre pour montrer son équipement. Rien, alors il se met en colère et est verbalisé pour le mensonge qui fait rire l’un des trois policiers qui le contraignent à faire demi-tour.

Une jeune femme d’une trentaine d’années se justifie en assurant qu’une voiture de plus ou de moins ne changera pas le niveau de la pollution. Une autre, du même âge, immatriculée dans le 93 raconte qu’elle connait trop mal le réseau du métro pour l’emprunter pour aller à un rendez vous sur les Champs Elysées. (Souvent entendu).

Un quinquagénaire venant lui aussi du 93, explique aux deux policiers qui lui demandent de faire demi-tour ou de se garer que  « les alertes pollution sont inventées par la maire de Paris pour embêter les automobilistes auxquels elle fait la chasse depuis des années. Et le métro, il est toujours en panne». A celui là, mais à celui-là seulement, j’ai demandé s’il le prenait souvent : « non, comme je viens de le dire aux flics, il est toujours en panne ».

Un trentenaire aux allures de jeune cadre, au volant d’une Espace, choisi d’engueuler les policiers, pourtant aimables et conciliants, en ajoutant que la mesure de circulation alternée est  une honte dans une capitale placée sous l’état d’urgence.  Mauvaise pioche : il n’échappera pas à une contravention de 32 euros parce qu’il refuse de payer immédiatement les 22 euros de l’amende minorée et à l’obligation de se garer sous la surveillance d’un policier.

Pour décider de faire respecter ou non l’interdiction, d’ordonner le demi tout ou d’imposer l’amende (en moyenne une fois sur deux) aux récalcitrants, les policiers n’ont qu’une seule solution : leur faculté d’appréciation du degré de sincérité de ceux qu’ils interpellent ou leur courtoisie caractérisant ou non leurs réponses. Les contrevenants évoquant la pollution sont largement minoritaires et ceux qui assurent qu’ils ne sont pas au courant largement majoritaires.

Conclusion ? Il n’y en a pas vraiment. Disons que la conscience écologique des automobilistes priés une ou deux fois par an de se passer de leur voiture et à emprunter les transports en commun n’est pas encore au beau fixe. Mais, il ya aussi tous ceux qui ont renoncé volontairement  à leur véhicules sans chercher à braver les interdictions.