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Journaliste depuis 30 ans, à la fois spécialiste des pays en proie à des conflits et des questions d'écologie,de protection de la nature et de société; derniers livres publiés: Guerres et environnement (Delachaux et Niestlé), L'horreur écologique (Delachaux et Niestlé), "La Grande Surveillance" (Le Seuil),une enquête sur tous les fichages (vidéo, internet, cartes bancaires,cartes médicales, telephone, etc). Et enfin "Enquête sur la biodiversité" (ed Scrinéo, coll Carnets de l'info). Aprés 20 ans au Journal du Dimanche, collabore désormais à l'hebdomadaire Politis et à Médiapart.

dimanche 25 octobre 2015

Climat: conférence de Bonn, l'hypocrisie de l'ONU et l'impuissance des ONG



Le climat des pré-négociations sur  le dérèglement climatique qui viennent de se terminer à Bonn était aussi chaud qu’obscurci par d’épais nuages de langue de bois comme en témoigne le communiqué final de l’ONU dont il faut rappeler qu’elle est responsable des conférences sur le dérèglement climatique depuis  35 ans. Un texte de 55 pages souvent incompréhensible qui masque notamment que les discussions ont chauffé entre les pays industrialisés et les nations émergentes qui ne souhaitent pas « payer » les obstinations et les dégâts des nations riches ; et que personne ne veut s’engager et résister aux lobbies énergétiques et pétroliers. Un communiqué qui évite soigneusement de préciser que le « préaccord » n’est est pas un puisque, pour sauver la face, les négociateurs y ont laissé plusieurs centaines de parenthèses contenant tous les désaccords, y compris ceux qui portent sur la conjugaison des verbes. Car dans un texte diplomatique il existe une différence considérable entre « devraient » ou « doivent », celle qui sépare le bon vouloir d’un pays signataire de l’obligation sous peine de sanctions. Sans oublier les astuces de traduction à partir de l’anglais (langue de travail) permettant de masquer certains différents. Rappels nécessaires pour apprécier le traditionnel enfumage des Nations Unies qui n’aiment pas avouer les impasses et les échecs…

« Les gouvernements du monde se sont pleinement approprié le projet de texte de l'accord, un texte équilibré qui constituera le point de départ pour le dernier round de négociations. Les négociations reprendront à Paris lorsque les gouvernements se retrouveront au Sommet sur les changements climatiques de Paris, du 30 novembre à 11 décembre 2015. La Secrétaire exécutive de la CCNUCC Christiana Figueres a déclaré que le projet de texte comprend des options supplémentaires qui reflètent les préoccupations des pays en développement. « Nous avons maintenant un texte qui appartient aux Parties, qui est équilibré et complet. Le défi pour les gouvernements est de le ramener à une structure beaucoup plus concise, claire et cohérente en vue de son adoption à Paris ».  

L’Ambassadrice française pour les changements climatiques Laurence Tubiana a déclaré: « Nous avons un texte gérable pour la poursuite des travaux à Paris. Bien que beaucoup de travail reste à faire, le texte est une bonne base pour les négociations et les négociations doivent commencer dès le premier jour de la conférence ».  Mesdames Figueres et Tubiana ont convenu que le processus politique entre aujourd’hui et le début du Sommet de Paris sera au cœur du succès de la réunion. Une réunion ministérielle de pré-COP aura lieu dans la capitale française au début du mois de novembre pour travailler plus avant sur les questions politiques de haut niveau concernant le projet d'accord ».

L’autre problème c’est aussi que la plupart des ONG, surtout  les plus importantes et les plus installées, manient exactement la même langue de bois que les plénipotentiaires, même si les arguments et les appréciations diffèrent bien que dilués dans une imprégnation « responsable ». Les Nations Unies ont bien peur de la réalité pour avoir expulsé ces représentants de la société civile lors de la conférence de Bonn. Ils sont en vérité bien inoffensifs, comme en témoigne l’extrait du communiqué de l’organisation internationale Oxfam. Elle et beaucoup d’autres paraissent avoir été contaminés ou anesthésiés par des années de fréquentation des diplomates du climat. Donc, l’opinion publique ne les entend pas plus ou pas mieux que les délégués officiels. Et les manifestations auront bien du mal à masquer les récupérations multiples de la société politique et industrielle française qui fait feu de tout bois avec la COP 21 qui leur servent surtout à faire oublier leurs responsabilités.

« Nous avons aujourd’hui les bases textuelles pour qu’un accord ambitieux et équitable soit signé à Paris, mais nous manquons pour l’instant clairement de volonté politique pour y arriver. « A 6 semaines de la COP21, deux visions de l’accord de Paris se dessinent. D’un côté, un accord  qui fait le choix du plus petit dénominateur commun et ne répond pas à l’étendue des besoins des populations les plus vulnérables. De l’autre, un accord ambitieux et équitable, qui souligne l’importance de l’adaptation pour les populations les plus vulnérables au changement climatique. Il s’agira d’ici Paris de choisir les bonnes options. Les pays en développement ont été clairs sur le fait que la présidence française sera jugée sur la place donnée aux financements climat dans l’accord de Paris. Cette question est pourtant encore aujourd’hui une équation à multiples inconnues.

Les décideurs politiques doivent passer à la vitesse supérieure afin de rehausser l’ambition en termes de réduction des émissions et de s’assurer que les financements pour l’adaptation des populations les vulnérables soient bien mis sur la table. Surtout l’accord ne peut entériner le déficit actuel de financement de l'adaptation alors même que tout indique que les engagements actuels nous maintiennent sur une trajectoire de l'ordre de 3°C, qui serait dévastatrice en termes d’impacts»

Les pays réunis à Bonn et qui doivent se retrouver à Paris, ne réussiront effectivement pas à prendre des décisions entrainant un ralentissement du réchauffement. Les effets à la fois de la résignation politique et l’offensive du monde des affaires et de l’industrie, notamment pour nous vendre encore plus de nucléaire. Mais cela fait des années que les ONG le répètent sans dépasser la faible audience de leurs membres et sans changer leur vocabulaire. D’autant plus que plongés comme lors des précédente conférences dans les discussions sur les virgules et la conjugaison des verbes, les diplomates n’évoqueront pas en séance les dérèglements climatiques en cours, avec leurs cortèges de réfugies, de morts et de dégâts. Aussi bien en France, qu’aux Etats-Unis, en Afrique ou en Asie.



vendredi 9 octobre 2015

Fukushima:reportage effrayant dans la centrale accidentée



                Plus de quatre ans après l’accident qui a affecté trois de ses réacteurs, la découverte, sous étroit contrôle, de la centrale sinistrée de Fukushima où s’affairent des milliers d’ouvriers intérimaires et des centaines de techniciens, reste un choc angoissant. Le désordre y règne toujours et l’image obsédante des centaines d’énormes cuves pleines d’eaux contaminées, rappelle que la question de la pollution n’est pas réglée et que fréquemment, notamment lors des pluies diluviennes qui ont frappé la région à la mi-septembre, la contamination continue à atteindre le sous-sol et la mer : passant sous la plage où, vision saisissante, deux réacteurs- heureusement à l’arrêt lors du tsunami- avaient été construits parce que la Tpeco avait fait des économies pour assurer leur refroidissement. Sans tenir compte de l’éventualité d’un tsunami.
Autre question non réglée que les visiteurs découvrent en dépit des précautions des « guides » qui contrôlent la prise de photographies: la maitrise des trois réacteurs en partie fondus. Non seulement nul homme et nul robot ne peut aller évaluer les dégâts et apprécier l’état du magma de combustible nucléaire, mais les bâtiments n’ont pas été réparés. Pour cause de radioactivité trop importante. Seule la piscine ou refroidissaient les barres de combustible usagées a été sécurisée. Les responsables avaient promis la construction d’un sarcophage de protection pour 2019, mais ils n’osent plus avancer une date car ils ne peuvent pas l’envisager tant qu’ils ne sauront pas exactement dans quel état sont les réacteurs  et si la température ne va pas brusquement remonter au dessus des 100 degrés officiellement annoncés. Il suffit de se souvenir, pour être sceptique sur l’avenir, qu’il a fallu plus d’une dizaine d’années au consortium formé par Vinci et Bouygues pour construire et assembler le nouveau sarcophage destiné à coiffer un seul réacteur de la centrale de Tchernobyl et qu’il n’est toujours pas en place. Pour un coût qui devrait dépasser deux milliards d’euros en grande partie payé par la BERD, la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement. Les responsables de la centrale affirment qu’ils ne connaissent pas le montant des travaux déjà engagés.
                Que le retour à la « normale » dans les réacteurs de Fukushima soit désormais « envisagé » pour l’horizon 2040, se lit dans l’état du chantier où fourmillent des hommes dotés de masques et de combinaisons de protection côtoyant d’autres ouvriers arborant un dérisoire masque en tissu sur la bouche. Guère étonnant que depuis le début des travaux, la Tepco, ait déjà « usé » une centaine de milliers de salariés. Des intérimaires, sans qualification pour la plupart, atteignant les limites –non révélées- de leur exposition quotidienne à la radioactivité. Nul ne connait non plus, tout au moins officiellement, les dégâts, maladies ou décès, de cette exposition permanente
                Pourtant, ces travailleurs évoluent dans un paysage de cauchemar où la radioactivité évolue de mètre en mètre, atteignant des sommets prés des réacteurs accidentés. Les hommes, les camions et les grues travaillent dans un univers de déchets rouillés, de voitures et d’engins contaminés dont nul ne parait savoir quoi faire. Tous les véhicules du personnel présents sur place au moment de l’accident rouillent doucement sur les parkings depuis quatre ans et demi. Les milliers d’arbres du pourtour de la centrale irradiés du pourtour lors de l’explosion des bâtiments ont simplement été coupés et couchés aux abords de la clôture qui délimitent les frontières des installations. Ils attendent, comme les dizaines de millions de tonnes de terre grattée entassés dans les anciens champs de riz de la région, recouverts de bâche insuffisante à empêcher les ruissellements et les infiltrations dans les nappes souterraines.
                Entre les tas de déchets, les ferrailles rouillées, les cuves de rétention d’eau, serpentent des centaines de tuyaux et de câbles que les Japonais devront un jour décontaminer. Dans un désordre indescriptible, le long de routes étroites que parcourent des norias de camions d’où sortent parfois des nuages de poussières. Comme un résumé de la course contre la contamination menée par les ingénieurs de l’entreprise. Ils assurent qu’ils progressent mais n’en fournissent aucune preuve. Toutes les blessures de la catastrophe restent visibles. Et le projet d’injecter un mur de glace dans le sol pour contenir les infiltrations qui se poursuivent vers la mer, n’est pour l’instant qu’une méthode sous expérimentation. Les spécialistes de la Tepco, en sont encore au stade du bricolage et des tâtonnements, qu’il s’agisse de leur environnement industriel pollué ou des réacteurs fondus grillent en quelques minutes les robots téléguidés envoyés les explorer tant les radiations restent fortes…

vendredi 2 octobre 2015

Ecologie politique: un suicide collectif réussi !

Dans la chronique des péripéties de la décomposition des Verts, qu’il s’agisse de ceux qui partent ou de ceux qui restent, envers et contre tout, il n’est jamais- ou rarement- question de nature ou d’écologie. Comme si seule comptait les tristes palinodies de la mort également annoncée du Front de gauche qui agonise de discours en discours et s’illustre par ses contradictions réactionnaires, au pire, sur l’Ukraine ou la Syrie ou, au mieux, par des rêves sur des changements au cœur du parti socialiste. Ce qui rappelle que face au parti de gauche, seul le parti communiste parait résister à une décomposition que des politologues prédisent pourtant depuis des années. A vouloir marier la carpe et le lapin, les écolos deviennent une espèce en voie de disparition.
Donc, les uns et les autres qui se parent encore de l’étiquette « d’écologistes » oublient leurs fondamentaux, nés des luttes associatives des années 70 et 80 du siècle dernier. Comme s’ils avaient de leur passé récent fait table rase. Les ours, les loups, la biodiversité, le climat qui se dégrade, le recours aux énergies renouvelables, la lutte contre la prolifération nucléaire ne font plus vraiment leurs préoccupations. Ils oublient, saisis par un « gauchisme » parfois dénoncé ou par leur fascination pour un pouvoir qu’ils ont déserté de peur de se salir les mains, à quel point leurs divisions remettent en cause quelques un de leurs acquits, de leur succès. Ils piétinent avec un acharnement dérisoire une histoire commencée en 1974 avec la candidature de René Dumont et la révolte créative du monde associatif. Ils oublient l’espoir qu’ils ont pu soulever aussi bien chez les citadins que dans les espaces ruraux.
Ils sont devenus leur propre caricature et retournent au temps de leurs divisions du début des années 80 quand ils réussissaient à offrir en même temps trois organisations antagonistes aux citoyens qui rêvaient d’un pouvoir verdi par la force d’une société civile dont les victoires ne se basaient pas seulement sur le recours aux tribunaux administratifs et au Conseil d’Etat. Ce faisant, les écologistes abandonnent le terrain à l’écolo-égoïsme triomphant qui ne dénonce des projets que lorsqu’ils menacent son confort et son environnement proche.
Adeptes anciens du recyclage, les écologistes politiques se précipitent têtes baissées vers les poubelles de l’Histoire trop heureuses de les accueillir…
ils seront comptables, comme d’autres, des succès à venir des fascistes du Front national.