Fukushima:reportage effrayant dans la centrale accidentée
Plus de
quatre ans après l’accident qui a affecté trois de ses réacteurs, la
découverte, sous étroit contrôle, de la centrale sinistrée de Fukushima où
s’affairent des milliers d’ouvriers intérimaires et des centaines de
techniciens, reste un choc angoissant. Le désordre y règne toujours et l’image
obsédante des centaines d’énormes cuves pleines d’eaux contaminées, rappelle
que la question de la pollution n’est pas réglée et que fréquemment, notamment
lors des pluies diluviennes qui ont frappé la région à la mi-septembre, la
contamination continue à atteindre le sous-sol et la mer : passant sous la
plage où, vision saisissante, deux réacteurs- heureusement à l’arrêt lors du
tsunami- avaient été construits parce que la Tpeco avait fait des économies pour
assurer leur refroidissement. Sans tenir compte de l’éventualité d’un tsunami.
Autre question non réglée que les
visiteurs découvrent en dépit des précautions des « guides » qui
contrôlent la prise de photographies: la maitrise des trois réacteurs en partie
fondus. Non seulement nul homme et nul robot ne peut aller évaluer les dégâts
et apprécier l’état du magma de combustible nucléaire, mais les bâtiments n’ont
pas été réparés. Pour cause de radioactivité trop importante. Seule la piscine
ou refroidissaient les barres de combustible usagées a été sécurisée. Les
responsables avaient promis la construction d’un sarcophage de protection pour
2019, mais ils n’osent plus avancer une date car ils ne peuvent pas l’envisager
tant qu’ils ne sauront pas exactement dans quel état sont les réacteurs et si la température ne va pas brusquement
remonter au dessus des 100 degrés officiellement annoncés. Il suffit de se
souvenir, pour être sceptique sur l’avenir, qu’il a fallu plus d’une dizaine
d’années au consortium formé par Vinci et Bouygues pour construire et assembler
le nouveau sarcophage destiné à coiffer un seul réacteur de la centrale de
Tchernobyl et qu’il n’est toujours pas en place. Pour un coût qui devrait
dépasser deux milliards d’euros en grande partie payé par la BERD, la Banque
Européenne pour la Reconstruction et le Développement. Les responsables de la
centrale affirment qu’ils ne connaissent pas le montant des travaux déjà
engagés.
Que le
retour à la « normale » dans les réacteurs de Fukushima soit désormais
« envisagé » pour l’horizon 2040, se lit dans l’état du chantier où
fourmillent des hommes dotés de masques et de combinaisons de protection côtoyant
d’autres ouvriers arborant un dérisoire masque en tissu sur la bouche. Guère
étonnant que depuis le début des travaux, la Tepco, ait déjà « usé »
une centaine de milliers de salariés. Des intérimaires, sans qualification pour
la plupart, atteignant les limites –non révélées- de leur exposition
quotidienne à la radioactivité. Nul ne connait non plus, tout au moins
officiellement, les dégâts, maladies ou décès, de cette exposition permanente
Pourtant,
ces travailleurs évoluent dans un paysage de cauchemar où la radioactivité
évolue de mètre en mètre, atteignant des sommets prés des réacteurs accidentés.
Les hommes, les camions et les grues travaillent dans un univers de déchets
rouillés, de voitures et d’engins contaminés dont nul ne parait savoir quoi
faire. Tous les véhicules du personnel présents sur place au moment de
l’accident rouillent doucement sur les parkings depuis quatre ans et demi. Les
milliers d’arbres du pourtour de la centrale irradiés du pourtour lors de
l’explosion des bâtiments ont simplement été coupés et couchés aux abords de la
clôture qui délimitent les frontières des installations. Ils attendent, comme
les dizaines de millions de tonnes de terre grattée entassés dans les anciens
champs de riz de la région, recouverts de bâche insuffisante à empêcher les
ruissellements et les infiltrations dans les nappes souterraines.
Entre
les tas de déchets, les ferrailles rouillées, les cuves de rétention d’eau,
serpentent des centaines de tuyaux et de câbles que les Japonais devront un
jour décontaminer. Dans un désordre indescriptible, le long de routes étroites
que parcourent des norias de camions d’où sortent parfois des nuages de
poussières. Comme un résumé de la course contre la contamination menée par les
ingénieurs de l’entreprise. Ils assurent qu’ils progressent mais n’en
fournissent aucune preuve. Toutes les blessures de la catastrophe restent
visibles. Et le projet d’injecter un mur de glace dans le sol pour contenir les
infiltrations qui se poursuivent vers la mer, n’est pour l’instant qu’une
méthode sous expérimentation. Les spécialistes de la Tepco, en sont encore au
stade du bricolage et des tâtonnements, qu’il s’agisse de leur environnement
industriel pollué ou des réacteurs fondus grillent en quelques minutes les
robots téléguidés envoyés les explorer tant les radiations restent fortes…
1 commentaire:
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